Principaux résultats

Essais

Le montage a été réceptionné en Mai 2015 après une phase importante de déverminage, d’apprentissage et de validation de la méthodologie. 12 essais servant de référence commune aux partenaires du projet ont été réalisés : 4 type de sollicitations pour 3 drapages différents de C3-1 à C3-3).

Le film d'un essai de cisaillement (gauche) et celui d'un essai combiné traction-cisaillement (droite) sont visibles ci-après :

On observe la création d’une cloque liée au flambement en cisaillement. Il y a une interaction entre la réponse en postflambement et la propagation de défauts en pointe de coupure avant la rupture finale.



Mesures (ICA) 

Dans ce projet, on s’oriente vers l’utilisation de la Stéréo Corrélation d’Images Numériques avec un formalisme Eléments-Finis (Stéréo-CIN-EF ou SCIN-EF). Elle permet de fournir (a) des champs cinématiques mesurés à comparer aux champs cinématiques calculés en vue de la validation et (b) une information (partielle) des conditions aux limites à imposer au modèle.

Une méthode de mesure de champs éléments finis. Les champs fournis par les codes commerciaux de SCIN et d’analyse par élément finis (FEA) sont très différents. Par exemple, les logiciels éléments finis expriment le déplacement comme les degrés de liberté aux nœuds d’un maillage éléments finis. De leur côté, les logiciels de CIN commerciaux expriment le déplacement comme des valeurs ponctuelles sur un nuage de point dans un repère différent de celui de maillage. La difficulté supplémentaire réside dans le fait que les domaines de définition de ces champs différent, puisque, par exemple, les logiciels actuels en CIN ne permettent pas de s’approcher des bords, ou tout simplement parce que des contraintes expérimentales conduisent parfois à n’observer qu’une partie seulement de l’éprouvette. Enfin, quantifier la distance entre un champ mesuré par SCIN et un champ simulé n’est pas une tache évidente.

Dans ce projet, une méthode de SCIN basée sur les éléments finis a été développée pour permettre d’unifier les descriptions des champs simulés et mesurés. Elle se base sur une formulation du problème de conservation des niveaux de gris écrite dans le repère du maillage en se basant sur des modèles non-linéaires de caméra.

Cette formulation s'écrit dans le repère du maillage directement. Le problème de corrélation a pour seule inconnue, le déplacement U tridimensionnel interpolé par éléments finis sur le même maillage que la simulation:

Cette méthode de mesure de champs de déplacement par Stéréo Corrélation d'images éléments finis a consistué la première étape. Avec une telle formulation, il est également possible d'utiliser directement le modèle pour régulariser le champs de déplacement mesuré pendant la mesure.

Exemple de mesure de Corrélation Stéréo éléments finis sur un essai de traction sur éprouvette double épaisseur. Comparaison avec la mesure local VIC3D

Une deuxième phase à consisté à mesurer les conditions aux limites que l'éprouvette subit véritablement pendant l'essai, afin d'être capable de l'imposer au modèle pour la simulation. Il ne s'agit plus à proprement parlé d'une mesure surfacique, puisqu'elle permet d'obtenir de l'information sur la cinématique dans l'épaisseur, compte tenu des images de la peau supérieure et de la connaissance d'un modèle de comportement élastique réputé fiable. En effet, en SCIN, seul le déplacement de la peau visible est mesuré, mais le déplacement à cœur n’est pas accessible directement. Ainsi Réthoré propose de faire l’hypothèse de l’homogénéité du déplacement dans l’épaisseur de l’éprouvette, ce qui est envisageable dans des cas d’éprouvettes de faible épaisseur avec des chargements uni-axiaux, ce qui n’est pas le cas ici. Dans cette étude, pour aller plus loin dans le dialogue essais/calculs, l’objectif est de mesurer directement les conditions aux limites à appliquer à la simulation (déplacements et rotations ou déplacements dans l’épaisseur selon la modélisation). Pour ce faire, on se propose de s’appuyer sur un modèle EF réputé fiable pour régulariser la mesure Stéréo-CIN.

Mesure de champs multiéchelles. Pour estimer ces conditions aux limites, le champ de vision doit impérativement visualiser la plus grande partie de l’éprouvette. Cependant, compte tenu de la finitude de la définition des capteurs CCD, ce choix fixe la résolution de mesure. Dans le cas de structures de grande taille, cette résolution s’avère souvent insuffisante. On se propose donc d’instrumenter l’essai avec au moins deux bancs de deux caméras, ce qui permet de lever ce compromis et réduire les incertitudes de mesure et d’identification.



Modélisation DPM (ICA) 

Le modèle « Discrete Ply Model » initié et développé par Christophe Bouvet permet la simulation des endommagements des structures composites stratifiées composites à base d’UD. Il est basé sur un maillage orienté dans les directions des plis :

Des éléments cohésifs sont utilisés pour le délaminage et pour la fissuration matricielle. Une hypothèse implicite est que seules les fissures traversantes sont importantes. Ici le modèle ne peut prendre en compte la fissuration diffuse. Par contre, cette géométrie permet un couplage naturel des endommagements intra et inter laminaire ce qui est un point clef pour l’efficacité d’une stratégie de modélisation. Les lois d’endommagements sont décrites succinctement ci-après :

Cette modélisation a été initialement conçue pour les problématiques d’impact et a pu modéliser de manière prédictive les endommagements dans de nombreux cas (Impact basse vitesse/basse énergie, Compression Après Impact, Edge Impact, Impact on dropped Plies). Cette approche a aussi été étendue au crash, au pull-through et très récemment à la rupture trouvée. Pour plus de renseignements, voir les publications des pages personnelles de C. Bouvet, B. Castanié et S. Rivallant.

Un avantage significatif est que cette méthode repose sur seulement 13 caractéristiques mécaniques, intrinséques et obtenues par des essais classiques. Il n’y a pas de recalage. Le principal inconvénient est un maillage complexe, qui pour l’instant n’a pas été automatisée par un éditeur de logiciel.

Le modèle a d’abord été testé sur des éprouvettes trouées pour vérifier son aptitude à capturer les effets d’échelle (J. Serra et al, Composite Structures 2016) puis sur des éprouvettes entaillées sollicitées en traction.

Le suivi d’essai a été réalisé par D.I.C mais aussi par thermographie infrarouge, plus adaptée au suivi des ruptures de fibres à l’intérieur de l’éprouvette.

(Inserer le film)

Le modèle DPM permet de bien retrouver les courbes Contraintes/Déformations  mais aussi le scénario de rupture :



Dialogue Calcul/essais sur VERTEX (ICA). 

La mesure du champ de déplacement est effectuée dans la Zone 1 et les conditions limites sont imposées sur le bord de la Zone 1bis (trois déplacements) ainsi que sur 3 rangées de nœuds supplémentaires (déplacement hors plan) selon la méthode développée par Stevek et Olsson. La zone utile (Zone 1bis), c’est-à-dire celle utilisée pour le calcul par éléments finis (Figure 5) est plus petite (300 × 300 mm2) que la portion de la plaque observée (Zone 1). Cela permet de réduire les effets de bords liés à la régularisation de la mesure par S-CIN-EF [6].

La mesure par stéréovision s’effectue en plusieurs étapes. D’abord la mesure de forme initiale est réalisée (courbure de la plaque), ensuite les déformations associées à la fixation de la plaque sur le bâti sont déterminées en comparant les images avant et après serrage, enfin les variations des déplacements liées aux véritables étapes de chargement sont évaluées.

Le passage de la plaque non fixée à la plaque fixée inclut un mouvement de corps solide non négligeable. De plus, un changement dans l’éclairage entre les deux photos (plaque non fixée et plaque fixée) a souvent été observé lors des différents essais. Cette variation d’intensité lumineuse est très probablement due à un léger déplacement du spot lumineux utilisé pour éclairer la plaque, survenu lors des nombreuses manutentions nécessaires à son installation (serrage de nombreuses vis et câblage des jauges de déformation). Ces deux facteurs ont généré des erreurs de mesure. L’image de « référence » choisie pour la détermination des conditions limites utiles à la simulation numérique est donc l’image de la plaque fixée.

Numériquement, le calcul est donc divisé en « n » pas de calcul correspondant aux « n+1 » images fournies par les caméras de stéréocorrélation. Une variation linéaire des déplacements est appliquée entre les différents états déterminés. Une approximation du chargement (discrétisation en « n » segments de droite) est donc inhérente à la méthode proposée. Un protocole d’échanges de données entre les résultats de la mesure et le code Abaqus a aussi été développé. Les figures ci-dessous présentent quelques comparaisons calcul/essai en traction et cisaillement avec des résultats très correct en traction. En cisaillement des efforts sont en cours pour maitriser à la fois le postflambement et son interaction avec les endommagements.







Apport LMT  

L’ambition de la thèse réalisée au LMT était d’étendre le domaine de prédiction du mésomodèle à des éprouvettes dites technologiques notamment en améliorant en améliorant la robustesse des calculs et les capacités prédictives du modèle en matière de fissuration. La démarche proposée a consisté à introduire des interfaces endommageables à l’intérieur du pli, capables de reproduire fidèlement l’initiation et la propagation du phénomène de splitting observé expérimentalement et qui conduit, s’il est mal pris en compte, à un conservatisme bien trop important des résultats numériques par rapport aux résultats expérimentaux. Pour cela, l’idée a été d’exploiter le logiciel commercial SAMCEF, qui intègre le mésomodèle amélioré. Ce choix est motivé par les exigences des partenaires industriels qui souhaitent, en vue du transfert vers l’industrie, des développements sur leurs outils numériques commerciaux.

    1. Enjeux et problématique, état de l’art

Les travaux réalisés dans le cadre du projet VERTEX visent à franchir un pas décisif dans la mise en place d’une démarche numérique de prédiction de la tenue à rupture des structures stratifiées dans le but d’accélérer la conception des futurs aéronefs tout en allégeant leur structure. L’idée développée ici consiste à construire une stratégie prédictive de détection pour la prise en compte des différentes zones dans lesquelles apparaissent des fissures de type splitting (figure 1). Ces fissures jouent un rôle crucial dans le scenario qui conduit à la rupture d’une pièce en matériau composite. Leur non prise en compte conduit à grandement sous-estimer la tenue à rupture de la structure. La stratégie développée ici permet de prédire finement l’apparition et la propagation de ces fissures et a été prévue pour être intégrée dans les outils logiciels commerciaux utilisés par les industries aéronautiques. Elle a notamment été introduite dans le code SAMCEF. L’intégration dans un logiciel commercial permet en plus de prendre en compte les paramètres de conception (dans le cas qui nous intéresse les diverses séquences d’empilement ainsi que les différentes géométries d’éprouvettes) en vue d’explorer et d’optimiser simplement les séquences d’empilement, voire d’en concevoir de nouvelles.


Figure 1. Mise en évidence expérimentale du phénomène de splitting

La problématique est de prendre en compte les phénomènes qui interviennent à une échelle microscopique (en l’occurrence la microfissuration …) pour déterminer le lieu d’apparition des macrofissures. Un projet de Recherche Collaboratif lancé par l'union européenne en 2008 intitulé MAAXIMUS (More Affordable Aircraft Structure Lifecycle through eXtended, Integrated, & Mature nUmerical Sizing) avait permis de proposer une version du mésomodèle dite améliorée permettant la prédiction de la tenue à rupture des structures stratifiées. Les résultats numériques obtenus dans [Abisset 2011] avait montré une remarquable fidélité vis-à-vis des résultats expérimentaux mais aussi certaines imprécisions notamment dans le cas de structures présentant un splitting fort (localisation de la fissuration transverse). Cette version est implémentée et disponible dans le code de calcul commercial SAMCEF. L’introduction, dans le cadre du projet VERTEX, d’une approche de détection/calcul basée sur des indicateurs du mésomodèle des composites LMT ([Ladevèze 2017]) permet de rendre compte du phénomène de splitting et de prédire avec précision la charge à rupture des éprouvettes.

    1. Approche scientifique et technique

Un premier aspect est la maîtrise du calcul. Pour développer une stratégie de calcul robuste, des études paramétriques ont été menées afin d’étudier l’influence des paramètres numériques liés à la discrétisation du problème physique et des constantes liées aux limiteurs de localisation. Ainsi, un domaine de paramètres a été mis en évidence afin de proposer une stratégie de calcul précise et robuste.

Un second aspect pour la construction d’un outil d’aide à la conception virtuelle de nouvelles structures en matériau composite a concerné la prise en compte des contraintes du cahier des charges. Pour cela, les développements informatiques ont été intégrés dans le logiciel de calcul SAMCEF utilisé par les industriels. Ceci permet de proposer dans un outil performant et documenté, la dernière version du mésomodèle LMT ainsi que le critère de détection nécessaire à l’intégration des splits dans les simulations. Ainsi le critère de détection a été implémenté en utilisant uniquement les commandes SAMCEF, disponibles dans le module de post traitement du code.



    1. Résultats obtenus

La méthode de prédiction-simulation des splits mise en place dans le projet VERTEX a été testée sur nombreuses éprouvettes composites, présentant des géométries et des séquences d’empilement différentes, qui correspondent aux matériaux employés en aéronautique. Ces éprouvettes ont été testées virtuellement jusqu’à rupture et les résultats numériques confrontés aux résultats expérimentaux (figures 2 et 3). La nouvelle stratégie a permis de discriminer de manière très claire 3 séquences d’empilements proposées par l’industrie aéronautique. Fondée sur la potentialité d’apparition de fissures de type splitting et leur propagation, la nouvelle méthode a permis d’expliquer et de prédire précisément le comportement à rupture des éprouvettes. Des stratégies d’intégration de ces macrofissures dans les simulations « on the fly » ont été imaginées en lieu et place de l’actuelle stratégie.

Figure 2. Prédiction de la charge à rupture pour 3 empilements avec l’ancienne méthode et la stratégie développée dans VERTEX pour prédire les splits : les résultats expérimentaux sont reproduits avec précision



Figure 3. Mise en évidence numérique du phénomène de splitting

    1. Exploitation des résultats

La nouvelle méthodologie mise en place pour coupler la détection et la simulation des splits basée sur la théorie du mésomodèle LMT permet de mixer de manière très simple les effets des paramètres micromécaniques (typiquement dans le cas des stratifiés, la microfissuration dans les plis) sur les quantités macromécaniques (typiquement des macrofissures de type splits).

Les études réalisées sur les éprouvettes composites ont permis une compréhension beaucoup plus fine des phénomènes mis en jeu dans l’initiation et la détection des macrofissures de type split et la possibilité d’optimiser la précision des prédictions sur la tenue à rupture de la structure en fonction des séquences d’empilement réelles dans les structures aéronautiques, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent.

    1. Conclusions

Les essais virtuels réalisés en introduisant dans les simulations des interfaces cohésives précisément à l’endroit calculé via un critère ad hoc développé au cours de l’étude ont montré le fort potentiel prédictif de cette nouvelle approche par rapport à une approche classique exhibant des erreurs pouvant aller jusqu’à 30% pour les approches classiques et ouvrant la perspective à de nouvelles solutions technologiques pour les futurs aéronefs.



Apport ONERA 

    1. Problématique

Du point de vue de l’Onera, l’un des enjeux majeurs de l’ANR Vertex consistait à mettre en œuvre le modèle de comportement avancé développé pour les composites stratifiés – et par extension toutes les lois de comportement développées à l’Onera – dans un code de calcul commercial, en l’occurrence ABAQUS, de manière à transférer plus aisément ces travaux aux partenaires industriels, ici Airbus Group. Or, la majorité des modes de ruine du pli unidirectionnel induisent par construction un comportement adoucissant, de manière à modéliser la rupture progressive au voisinage d’une singularité. Or, l’adoucissement cause en pratique la perte d’ellipticité (respectivement d’hyperbolicité) de l’équation d’équilibre (respectivement de l’équation de la dynamique), ce qui induit la localisation des déformations sur quelques éléments de maillage [3]. Quand on raffine le maillage, la déformation tend à se localiser sur une couche d’un élément, voire sur une “ligne” de points d’intégration. Cette localisation qui pourrait être souhaitable a priori – car on voudrait voir une fissure d’épaisseur nulle se créer – est en fait un véritable problème. En effet, lorsque la taille de maille diminue, le volume endommagé et donc l’énergie dissipée diminue également. Quand on fait tendre la taille des éléments vers zéro, ce que l’on peut légitimement vouloir faire dans une analyse de convergence, l’énergie dissipée à rupture tend également vers zéro ce qui n’est pas acceptable. De ce fait, la localisation due à une perte d’ellipticité ne permet pas d’obtenir une solution convergée.

Les solutions numériques sont nombreuses. Parmi les méthodes les plus connues et les plus employées on peut citer (i) la classe des méthodes à effet retard, (ii) les techniques de type crack band (parfois appelées smeared crack) ou encore (iii) la famille des méthodes non-locales.

Les méthodes non-locales consistent à ajouter explicitement aux équations de la mécanique un mécanisme permettant de diffuser une des quantités qui localise (la déformation, une force thermodynamique ou encore directement l’endommagement). Cela peut se faire notamment par l’introduction d’une forme de diffusion d’une de ces variables, via une méthode à gradient implicite, dont le formalisme s’intègre très bien dans un formalisme par éléments finis. Cette méthode reste néanmoins très intrusive car elle nécessite l’utilisation d’éléments non standards. C’est précisément sur ce point que se sont concentrés les efforts de l’Onera dans le cadre de l’ANR Vertex.

    1. Formalisme de la méthode non locale

En régime quasi-statique, la méthode non locale implicite consiste à résoudre le système d’équations suivant :

Connaissant les conditions aux limites :

Et la loi de comportement F telle que :

On retrouve dans ce formalisme l’équation d’équilibre « classique », à laquelle s’ajoute une équation non locale qui introduit un terme de diffusion qui porte sur la variable à délocaliser f. Celle-ci peut être une mesure de la déformation, une force thermodynamique ou encore directement l’endommagement. On associe à cette variable une version non locale , qui est traitée comme une inconnue primale du problème EF, au même titre que les déplacements. C’est celle-ci qui sera utilisée dans la loi de comportement plutôt que la version localisée. Cette équation de diffusion est paramétrée par la grandeur c. Des travaux récents à l’Onera semblent indiquer que ce paramètre peut s’interpréter physiquement comme la taille de la « process zone » autour d’une fissure en formation. Néanmoins, dans le cadre de ces travaux, nous utiliserons c comme un simple paramètre matériau recalé numériquement.



    1. Application à la loi Onera-Vertex

      1. Choix de la variable non-locale

S’il est en théorie possible d’introduire un nombre quelconque de variables non locales, nous avons choisi de privilégier une variable unique, par souci de simplicité et d’efficacité. Au travers de cette variable non locale, l’objectif est de régulariser le comportement du matériau lorsque les modes de ruine en rupture de fibres sont actifs. Ainsi, le mode de ruine catastrophique par compression transverse du pli sera dans un premier temps sans effet sur le comportement du pli endommagé. Les cas-tests sont choisis de sorte que cette hypothèse ne soit pas critique.

Pour rassembler les deux modes de ruine de rupture fibre dans une unique variable non locale, nous introduisons le critère tel que :

On associe à ce critère de rupture une variable d’endommagement et un tenseur des effets de manière identique aux variables d’endommagement introduites dans la section 2. Ce tenseur pourra éventuellement prendre lui aussi des valeurs différentes en traction ou en compression.



      1. Description du cas-test de l’implémentation ABAQUS du non local

L’implémentation de la méthode non-locale implicite dans le code ABAQUS nécessite de développer intégralement un élément utilisateur adapté. Dans le cadre de l’ANR Vertex, nous avons développé un élément basé sur l’hexaèdre quadratique C3D20, représenté sur la 11. Les déplacements de chacun des vingt nœuds de l’élément suivent donc un schéma quadratique. A ces degrés de liberté est associé un degré de liberté supplémentaire qui est celui de la variable non locale f1nl. Celle-ci suit en revanche un schéma linéaire, et n’est donc définie que sur les nœuds 1 à 8 de l’élément. Ce choix d’interpolation est nécessaire afin d’éviter toute oscillation numérique [16].

Figure 11: Représentation de l'élément C3D20 dans l'espace isoparamétrique.

Par ailleurs, puisque l’élément est reconstruit intégralement, il n’est pas a priori possible de lui donner une orientation au moyen des techniques usuelles en ABAQUS, car le code ignore tout de la géométrie de l’élément, de la définition de ses faces et donc de leurs orientations. Il est alors nécessaire de rentrer l’orientation matériau comme un paramètre de l’élément, et on gère directement dans l’élément les rotations du repère global au repère local dans lequel la loi du pli est exécutée.

Le cas-test choisi pour valider l’implémentation numérique est celui d’une plaque carré de longueur 400mm, munie d’une grande entaille de longueur 100mm. Cette plaque est similaire à celles qui ont été testées sur le moyen d’essai Vertex. Le but était en effet de pouvoir transitionner rapidement vers la comparaison entre les simulations et les vrais essais. Cette plaque est munie de trois plis – contrairement aux 13 plis des plaques réelles – pour pouvoir étudier le cas d’un empilement croisé. Le chargement est une traction simple dans la direction normale à l’entaille.

Le modèle utilisé est représenté en 12. On observe que seul un quart de la plaque a été modélisé pour des raisons de symétrie. Notons que ce choix est possible ici car nous nous limiterons pour cette validation à des orientations de pli égales à 0° ou 90°. Pour des orientations quelconques, cette symétrie est brisée, et il faudrait alors représenter l’intégralité de la plaque, ce qui ne pose pas de difficulté supplémentaire. La 13 montre un plan rapproché sur l’extrémité de l’entaille. En l’absence de zones cohésives, nous avons pu garder un maillage relativement grossier pour cet exercice de mise au point, afin de limiter les temps de calcul.

Figure 12 : Modèle EF de la plaque entaillée





Figure 13: Détail de la plaque entaillée





      1. Résultats pour un stratifié unidirectionnel

Le premier cas étudié est celui du stratifié unidirectionnel, orienté dans la direction de chargement, c’est-à-dire que les trois plis sont orientés dans la direction 90° par rapport au repère global (cf. 12). La 14 montre la concentration de contrainte observée au droit de l’entaille. On observe que celle-ci se localise sur quelques points de Gauss les plus sollicités. La conséquence attendue est la localisation de la force motrice sur quelques points de Gauss des éléments les plus chargés, comme on peut le voir sur la 15.

Figure 14: Concentration de contrainte au droit du trou pour le stratifié UD.

Figure 15: Localisation de l'endommagement en l'absence de régularisation



Néanmoins, grâce à la méthode non locale implicite introduite via notre élément utilisateur, on observe sur la 16 que l’endommagement des fibres –ici en mode traction – est correctement délocalisé, et ainsi reste réaliste et indépendant du maillage sous-jacent.



Figure 16: Endommagement des fibres près de l'entaille, pour le stratifié unidirectionnel.

      1. Résultats pour un stratifié [90°/0°/90°]

Une analyse similaire a été entreprise sur un stratifié croisé [90/0/90]. L’objectif principal était de vérifier que la prise en compte de l’orientation matériau dans l’élément utilisateur était valide. Pour cela, on représente sur la 17 le champ de la contrainte normale dans la direction de chargement. On vérifie alors que cette contrainte est maximale dans les plis à 90°, dont les fibres sont orientées dans la direction de chargement, et négligeable dans le pli à 0°, qui est du coup sollicité en mode interfibre. Ce point est confirmé sur la 18, qui montre que le critère de rupture fibre n’est pas actif dans ce pli à 0°, alors qu’il est maximal et qu’il localise dans les plis à 90°.

Pourtant, la 19 montre que la variable d’endommagement des fibres est non nulle dans le pli à 0°. Ce résultat non physique, et incompatible avec les champs de contraintes observés, s’explique par le fait que la variable non locale f1nl est définie aux nœuds, comme les déplacements, et interpolée par rapport aux valeurs de tous les nœuds adjacents, y compris dans les plis voisins. Si cette interpolation est justifiée pour les déplacements, qui restent homogènes dans la structure en absence de discontinuité, elle n’est plus nécessairement justifiée pour cette variable d’endommagement, qui est censée être définie pli par pli. Il parait donc nécessaire d’introduire des conditions de compatibilité entre les d.d.l. d’un élément à un autre afin de forcer cette variable à rester confinée dans chaque pli. Alternativement, des travaux antérieurs [10] ont montré qu’en introduisant, à l’interface entre les plis, des éléments de zone cohésive pour lesquels ce degré de liberté supplémentaire n’est pas défini, on obtenait le comportement attendu. Il est donc raisonnable de penser que cet artefact numérique sera absent des calculs complets sur les essais réels.



Figure 17: Concentration de contraintes au droit de l'entaille, pour un stratifié croisé.

Figure 18: Localisation de la force motrice dans les plis les plus chargés.

Figure 19: Diffusion de l'endommagement fibre au travers des interfaces de pli.

    1. Perspectives

Si l’implémentation de la méthode non locale implicite dans le code de calcul ABAQUS est un succès, le temps consacré à sa mise au point n’a pas permis de mettre bout à bout les différentes briques méthodologiques permettant de valider la loi sur les essais réalisés dans le cadre de l’ANR Vertex. Un certain nombre de points restent à vérifier lors des prochains travaux.

Dans un premier temps, il s’agira de coupler les éléments non locaux développés ici avec des éléments de zone cohésive placés à l’interface entre les plis. Ceux-ci ont une double fonction. D’abord, ils permettent naturellement de modéliser la tenue de l’interface, et de prévoir l’amorçage et la propagation du délaminage. Il s’agira alors d’introduire le couplage des endommagements inter et intralaminaires, c’est-à-dire l’influence des microdélaminages dans les plis sur l’amorçage d’un grand délaminage à l’interface entre les plis. De plus, les zones cohésives permettent aussi de confiner l’endommagement intralaminaire à l’intérieur d’un unique pli, et d’éviter ainsi la diffusion entre plis adjacents, non physique, et visible par exemple sur la 19.

Une fois cette étape validée, il sera alors finalement possible de simuler les essais réalisés sur les grandes plaques entaillées avec le moyen d’essai développé pour l’ANR Vertex. Pour ces derniers, le chargement imposé est défini par un champ de déplacements des nœuds externes, ces derniers étant eux-mêmes le résultat du traitement de la corrélation d’images (cf. travaux de J.E. Pierré). L’Onera a développé un outil qui permet de traiter ces déplacements et de les convertir en un fichier texte qui est fourni en entrée au logiciel ABAQUS, de manière à assigner nœud par nœud chaque composante de déplacement imposée.

Les premiers résultats obtenus sur les essais de validation, et leur comparaison avec les mesures de l’essai, permettront de valider la pertinence du modèle proposé par l’Onera, ainsi que de mettre en évidence ses éventuelles limitations. L’ensemble de ces travaux pourront, compte-tenu de l’avancement actuel, être lancés rapidement dans le cadre d’une suite à l’ANR Vertex.



Apport HOLO 3 

Lors du projet VERTEX, subventionné par l’ANR, la société Holo3 a pu refondre complétement la structure du logiciel CorreliSTC permettant ainsi d’obtenir un logiciel robuste et ergonomique pour l’utilisateur. La gestion de projet, de la langue, de différents format bruts (jusqu’à 940), de la corrélation d’images avec des images de 70 millions de pixels, rendent l’utilisation du logiciel CorreliSTC plus convivial. Cette nouvelle version 2.0 possède en plus des particularités de la version 1.54 (jauges virtuelles, profils.) un éditeur de rapport automatique, un import des résultats issus des simulateurs, une calculatrice qui utilise les résultats des jauges virtuelles. Ces ajouts facilitent le travail des opérateurs après les essais mécaniques.

Figure 1: Interface du logiciel CorreliSTC V2.1.0.1

L’accélération ainsi que la parallélisation des calculs ont permis d’obtenir une nouvelle fonctionnalité : l’analyse en temps réel. Pendant l’enregistrement des images, le calcul par stéréo corrélation est effectué tous les n niveaux, ce qui permet de suivre l’évolution des déplacements et des déformations lors de l’essai mécanique, tout en enregistrant des entrées analogiques. Une démonstration a été réalisée au mois de mars 2016 dans les locaux de l’ICA. Le transfert sur carte graphique est en cours de programmation dans nos locaux.

Figure 2: Calculs réalisés en temps réel



Apport LMS SIEMENS-SAMTECH FRANCE 

Modélisation

Conversion des données de mesures fournies par ICA :

Les déplacements mesurés en cours d’essai (Trois translations et deux rotations) sont fournis dans un fichier transmis par ICA. Un programme de conversion traduit ces données en une suite de commandes écrites en syntaxe de SAMCEF.

Le délaminageest modélisée par des éléments d’interface placés entre deux plis consécutifs et un maillage en quadrangles.

Le comportement de matériau utilisé est celui du modèle augmenté pour plis UD, mis au point par le LMT Cachan, qui prend en considération ; endommagement, plasticité, rupture.

Il est possible d’introduire un couplage entre les comportements intra et inter laminaires.

Le modèle augmenté de Cachan est obtenu en superposant au schéma standard, une description de la fissuration transverse considérée du point de vue micromécanique. L’interface est également modifiée. En plus de sa définition classique, on considère que l’endommagement dépend de la fissuration transverse du pli.

Il est non local: l’endommagement est constant sur l’épaisseur du pli et il n’y a pas d’interaction entre le pli et l’interface. Dans le but de tenir compte de ce comportement non local, l’utilisateur doit le préciser en utilisant un élément au comportement adéquat doté d’une hypothèse spécifique dite NON LOCALE. Si une autre hypothèse est choisie, l’aspect non local est ignoré. En conséquence, l’endommagement n’est plus constant sur l’épaisseur du pli, et l’interface ne voit pas la densité de fissuration.

Il est également possible d’introduire un endommagement initial.

Le modèle est le fruit des travaux de G. Lubineau et P. Ladevèze: Construction of a micromechanics-based intralaminar model and illustrations in Abaqus standard, Computational Materials Science, v. 43(1), pp. 137-145, 2008.

Résultats de calcul

Plaque en Traction ; empilement C3-2

Temps CPU : 11H37mn

Plaque en combiné Traction Cisaillement ; empilement C3-2

Temps CPU : 5h35mn

Module des déplacements en combiné traction cisaillement C32 :